La publication cette semaine par l’INSEE des chiffres 2023 des inégalités de salaires entres les femmes et les hommes dans le secteur privé avec 22,2% d’écart (34% en 1995) rend toujours aussi nécessaire la grève féministe du 8 mars et la lutte pour l’égalité au quotidien. Soyons nombreux et nombreuses pour revendiquer l’égalité des salaires et des pensions (38% d’écart à la retraite), la transposition de la directive transparence salariale, la fin des temps partiels imposés, la revalorisation des métiers à prédominance de femmes, la mixité des métiers, des carrières égales tout au long de la vie, la réduction du temps de travail avec les 32 heures et la retraite à 60 ans, ainsi qu’un service public de la petite enfance à la hauteur des besoins.

En bref :

En 2023, 22,2% d’écart en raison d’une différence de volume d’heures travaillées entre les femmes et les hommes car elles sont moins souvent en emploi et davantage en temps partiel.

De même les mères perçoivent 29,9% de moins que les pères et ces écarts se creusent à 40,9% pour les parents de plus de 3 enfants.

En neutralisant l’effet du volume d’heures travaillées sur les inégalités, l’INSEE identifie les autres causes des 14,2% restant :

  • Les femmes n’exercent pas les mêmes métiers et ne travaillent pas dans les mêmes entreprises et secteurs ;
  • Les plus bas salaires sont occupés à 54% par des femmes alors qu’elles occupent 42% des emplois dans le privé ;
  • Elles ne représentent que 24% des 1% des emplois les mieux rémunérés.

Et dans la Fonction Publique ?

La Direction Générale de l’Administration et de la Fonction Publique invisibilise le volume et le temps de travail et met en avant l’écart de salaire en équivalent temps plein qui est pour l’ensemble de la Fonction Publique de 10,5% (salaire moyen net mensuel est de 2 427 euros pour les femmes et de 2 711 euros pour les hommes). Ce chiffre est plus élevé pour la fonction publique d’Etat (13,1%) et encore plus dans la Fonction publique Hospitalière (18,3%, ce chiffre doit en réalité être plus important car il ne prend pas en compte les externes des hôpitaux).

En 2023, dans la fonction publique, 20 % des agent∙es travaillent à temps partiel (26 % des femmes contre 9 % des hommes).

En 2023, les femmes occupent 63% des emplois et 67 % pour les contractuel·les, mais seulement 43 % des catégories A+.

Elles occupent 70 % des 10 % des postes les moins bien rémunérés et seulement 49 % des 10 % les mieux rémunérés.

Les écarts se creusent lorsqu’on parle du 1 % des postes les mieux rémunérés où elles ne sont plus que 39 % et des 10 plus hautes rémunérations dans les ministères, où elles ne représentent que 25 %.

Un écart toujours autour de 25%

Le focus de l’INSEE pour les salaires du privé, les écarts entre les femmes et les hommes sont de 22,2 %. Le salaire net moyen est de 21 340 euros annuels pour les femmes contre 27 430 euros pour les hommes. En 1995, il était de 34%.

L’enjeu de l’emploi et du temps de travail des femmes

Cet écart est en grande partie due à la différence de volume de travail annuel moyen : les femmes entrent plus tardivement sur le marché du travail, elles occupent seulement 42% des emplois du privé, elles sont davantage sans emploi et occupent la majorité des temps partiels.

D’ailleurs, une note de novembre 2024 du conseil d’analyse économique estime qu’en prenant en compte les femmes privées d’emploi, l’écart de revenu entre les femmes et les hommes se creuse à 30 %.

L’écart se creuse avec l’âge : il est de 24,9% pour les 60 ans et plus.

Entre 1995 et 2023, l’écart de volume de travail s’est réduit de 15 % à 9 %. On observe la hausse du volume de travail des femmes depuis 2000 qui se stabilise entre 2015 et 2021, puis baisse en 2022 et 2023.

La CGT revendique : la fin des temps partiels imposés et une négociation sur le temps partiel, les 32 heures, la retraite à 60 ans, des politiques publiques en faveur de l’égalité.

L’enjeu de la revalorisation des métiers à prédominance féminine

L’INSEE a neutralisé les effets du volume du travail sur les écarts salariaux ce qui permet d’identifier une autre cause importante de ces inégalités qualifiée de « la ségrégation professionnelle ». Cette dernière explique l’essentiel des 13,5 % de différence de salaire net en EQTP entre femmes et hommes. Il était de 22% en 1995.

L’INSEE explique en effet que « les femmes et les hommes n’exercent pas les mêmes métiers et ne travaillent pas dans les mêmes entreprises ou les mêmes secteurs. Parmi les vingt professions les plus courantes pour chacun des genres, qui représentent environ 38 % de l’emploi des femmes (secrétaires, employées administratives, nettoyeuses, etc.) et 30 % de celui des hommes (conducteurs routiers, ingénieurs en informatique, conducteurs livreurs, etc.), seules quatre leur sont communes. Les femmes sont particulièrement sous-représentées dans certains secteurs d’activité, comme la construction ou les transports : elles ne représentent par exemple que 0,6 % des maçons qualifiés et 3,0 % des conducteurs routiers. À l’inverse, seulement 4,7 % des secrétaires sont des hommes. »

Par ailleurs, l’écart augmente avec la taille de l’entreprise : 7 % dans les entreprises de -10 salarié∙es, 17 % dans les entreprises de 5000 salarié∙es ou plus et il varie selon le secteur d’activité : de 12 % dans l’industrie, il est de 23 % dans les services mixtes.

La CGT revendique la revalorisation des métiers à prédominance de femmes et la mixité des métiers.

Pour aller plus loin voir l’étude IRES CGT sur les métiers du soin et du lien.

Le plafond de verre

La ségrégation professionnelle est aussi « le reflet d’inégalités hiérarchiques : par exemple, les postes de cadres dirigeants sont occupés à moins d’un tiers par des femmes ». Les inégalités sont plus fortes chez les cadres : 15% en équivalent temps plein. Les femmes représentent 34 % des effectifs percevant un salaire de 4 302 euros. Parmi les 1 % de salarié∙es les mieux rémunéré∙es, la part des femmes n’est plus que de 24 % alors qu’elles occupent 42% des emplois dans le privé.

La CGT revendique des évolutions de carrière égales, la mise en œuvre de la méthode de nuages de points (détail ?) et des enveloppes de rattrapage salarial.

Le plancher collant

L’écart en équivalent temps plein est également plus élevé chez les ouvrie∙es (12,9%) que pour les employé∙es. L’écart en temps de travail s’élève à 20%.

Les femmes sont majoritaires parmi les bas salaires : jusqu’à 54 % pour des niveaux de salaire autour de 1 410 euros nets mensuels.

La CGT revendique un SMIC à 2000 euros brut et l’indexation des salaires sur l’inflation.

Le plafond de mère

L’INSEE explique que les écarts de salaire augmentent avec le nombre d’enfants. « Les différences de volumes de travail entre les femmes et les hommes sont plus marquées pour les salariés parents que pour les autres salariés du privé (11,9 % contre 9,9 % dans l’ensemble, en 2022). Elles le sont encore davantage parmi les parents d’enfants de 3 ans ou moins (23,1 %) et ceux ayant trois enfants ou plus (17,7 %). »

« En outre, l’écart de salaire net en EQTP entre femmes et hommes croît avec le nombre d’enfants : en 2022, il est en moyenne de 5,8 % parmi les salariés du privé n’ayant pas d’enfant, mais atteint 28,2 % entre les mères et les pères de trois enfants ou plus. Ces différences proviennent à la fois de la baisse de salaire observée après la naissance mais aussi des carrières durablement ralenties des mères [Coudin et al., 2019]. Au total, la combinaison des écarts de volume de travail et de salaire net en EQTP conduit à un revenu salarial plus faible de 29,9 % pour les mères par rapport aux pères. Cet écart culmine à 40,9 % pour les parents de trois enfants ou plus. »

La CGT revendique un service public de la petite enfance à hauteur des besoins, l’allongement du congé paternité et d’accueil de l’enfant, un congé parental mieux rémunéré et partagé.

Les écarts inexpliqués

Les écarts inexpliqués sont estimés à 3,8%. Cette estimation de l’INSEE repose sur seulement 40% du secteur privé.

Les causes des inégalités expliquées peuvent être de « bonnes excuses » mises en avant par les employeurs pour justifier une bonne partie de l’écart constaté pour ne retenir, in fine, que cette différence de rémunération de 3,8% (la « part inexpliquée »). Au contraire, Il est possible et urgent d’agir sur les causes identifiées !