Après les déclarations générales, on rentre le mercredi 30 mai dans les amendements sur la 1ere partie du projet de convention (voir le projet de texte dans la dernière partie), préparé par le bureau de l’OIT. 102 amendements ont été déposés par le groupe employeurs, travailleurs, ou par un ou plusieurs gouvernements.
Le groupe travailleurs a débattu collectivement de ses amendements et décidé d’en déposer seulement 6, considérant que la proposition du bureau de l’OIT était une très bonne base de discussion. Pour les salarié.e.s français.es, nous avons proposé (conjointement avec les belges) deux amendements pour insister sur la nécessité d’avoir des instances de prévention sur chaque lieu de travail (nos CHSCT qui sont en train d’être supprimés par le gouvernement) et de garantir aux victimes le droit d’être accompagnées par des représentant.e.s du personnel (nous proposons en France la mise en place de référent.e.s élu.e.s). Ces amendements seront, nous l’espérons, retenus par le groupe et proposés dans la partie recommandation qui sera discutée en fin de semaine.
Les employeurs ont déposé beaucoup d’amendements. Pour transformer la convention en recommandation, pour limiter la définition des violences en excluant les violences psychologiques, pour supprimer la définition des employeurs (et ainsi exclure celle des donneurs d’ordre sur la sous traitance), limiter celle des travailleurs et travailleuses aux définitions des législations nationales (qui excluent souvent les stagiaires, les précaires, les candidat.e.s en recherche d’emploi…actuellement listé.e.s par le projet de convention), et pour limiter le champ de la convention aux violences se produisant sur le lieu de travail.
Aucun Gouvernement n’a déposé d’amendement pour transformer la convention en recommandation ce qui est le signe du rapport de force que nous avons construit. Les autres amendements des gouvernements représentent souvent des tentatives de compromis entre les demandes des employeurs et celles des travailleurs. Grâce à la pression mise par les syndicats sur chacun de leurs gouvernements, les pays européens ont déposé des amendements ensemble, proposant des compromis plutôt équilibrés. Sur la définition des violences et du harcèlement, les gouvernements européens proposent de reprendre les définitions de la convention d’Istanbul, ce qui permettrait de les étendre au niveau mondial et d’avoir ainsi une belle avancée.
Après une réunion du groupe des travailleuses et travailleurs du monde pour définir notre position sur chacun des amendements, la réunion de la commission plénière a commencé. Sur chaque amendement, la procédure est la même : l’organisation qui l’a déposé le défend, puis les groupes des employeurs et des travailleurs donnent leur avis, enfin, les gouvernements qui le souhaitent s’expriment. Si un compromis se dégage, l’amendement est adopté sans vote. Sinon on passe au vote à mains levées ou par appel nominal.
Le 1er amendement était présenté par les employeurs, pour transformer la convention en recommandation. Se sachant minoritaires, les employeurs ont proposé de repousser cet amendement à la fin de la discussion, pour pouvoir ainsi faire un chantage sur tout le reste de la discussion. Pour contrer cette stratégie, le groupe des travailleurs et travailleuses a concédé un compromis : repousser la discussion sur la forme de l’instrument (convention ou recommandation) seulement après la discussion sur les définitions, c’est à dire 24h plus tard, au lieu des 10 jours proposés par les employeurs. Ce compromis a été validé par les gouvernements, nous avons donc commencé par la discussion sur les définitions. Avec un début positif, puisque nous avons battu les employeurs sur leur définition très restrictive des violences. Celle de la convention d’Istanbul, proposée par les gouvernements européens, a été longuement discutée, notamment par les africains, qui la trouvent trop précise. La séance s’est achevée vers 22h et n’a malheureusement pas permis de trancher cette question, reportée à la séance suivante.
Bilan de la journée : les amendements proposés permettent d’escompter un texte de haut niveau, et le nombre de pays soutenant une convention a augmenté, avec la déclaration en séance de l’Irak, d’Israël et des Philippines notamment. La vigilance s’impose néanmoins pour la suite car les employeurs continuent à mettre la pression sur chacun des gouvernements pour essayer de changer des positions, et qu’ils vont tenter de jouer la montre, de faire durer la discussion sur les amendements pour retarder le débat sur la question de la convention…Gare à l’enlisement!