Cet ancien membre du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes et ancien sous-directeur des ressources humaines au ministère de la culture tenait un fichier intitulé « Expériences P », qui recense près de 200 victimes. Dans une décision rendue publique ce jeudi 16 février 2023, le tribunal administratif condamne l’État français à indemniser les victimes d’un ancien employé du ministère de la Culture, qui forçait des candidates à uriner devant lui avec des diurétiques. Via @AFP

Le verdict est tombé. L’État français a été condamné par le tribunal administratif après les agissements d’un haut fonctionnaire du ministère de la Culture, ce jeudi 16 février 2023. Cet ancien employé avait versé un diurétique dans le verre d’une femme, pour qu’elle urine devant lui lors d’un entretien d’embauche, et s’en était également pris à six collègues.  

Le tribunal administratif de Paris a publié le jugement qui exige d’indemniser cette ex-candidate à hauteur de 12 000 euros pour son préjudice, plus 1 500 euros au titre des frais de justice. L’affaire va au-delà, avec des humiliations reconnues par la justice administrative pour six membres des services du ministère. Ces femmes seront également indemnisées, selon un communiqué du tribunal, qui n’a pas précisé les montants. 

Tribunal administratif de Paris : Condamnation de l’Etat en raison des agissements d’un de ses fonctionnaires (tribunal-administratif.fr)

« DES SITUATIONS HUMILIANTES » 

Ce fonctionnaire, désigné par ses initiales (D.B.), était à l’époque de l’entretien d’embauche en mai 2012 sous-directeur des ressources humaines du cabinet de la ministre Aurélie Filippetti. Il « lui a proposé, en début d’entretien, un café qu’elle a bu, puis l’a invitée à poursuivre l’entretien à l’extérieur, dans le jardin des Tuileries », détaille le tribunal. « Ressentant rapidement des douleurs et une forte envie d’uriner », et obligée de le faire devant lui sous un pont, la candidate a demandé à rentrer chez elle. Elle a finalement été hospitalisée. 

Une enquête a montré plus tard que l’homme était coutumier du fait. En 2018, il a reconnu « avoir imposé des situations humiliantes aux femmes qu’il recevait ainsi en entretien et dont la liste a été tenue par lui dans un tableau », rappelle le tribunal. Le fonctionnaire a été révoqué en 2019, après de très nombreux témoignages contre lui. 

LA RESPONSABILITÉ DE L’ÉTAT « ENGAGÉE », SELON LA VICTIME 

Cette année-là, il était par ailleurs mis en examen pour « administration de substance nuisible », « agression sexuelle par personne abusant de l’autorité conférée par sa fonction », « atteinte à l’intimité de la vie privée par fixation d’image », « violence par une personne chargée de mission de service public » et « infraction à la législation sur les médicaments ». La suite de cette procédure pénale n’a pas été rendue publique. 

« C’est une affaire complètement folle d’un pervers », avait commenté le ministre au moment de cette mise en examen, Franck Riester. « J’aurais voulu qu’on m’arrête avant », avait pour sa part affirmé le fonctionnaire révoqué, interrogé par le journal « Libération ». La plaignante estimait la responsabilité de l’État « engagée en raison d’une mauvaise organisation des services du ministère de la Culture, en l’absence de dispositifs protégeant les victimes et recevant leurs plaintes ».